Sœur Albertine

Publié le par CERCLE SAINT-PIERRE

Sœur Albertine : « Dieu se révèle là où personne ne l’attend »

Sœur Albertine : Religieuse et influenceuse
Le 15 avr. 2025

Tout au long de cette Semaine sainte, La Croix donne la parole à cinq personnalités qui témoignent d’une soif spirituelle renouvelée, ou comment Dieu resurgit dans notre société. Religieuse et influenceuse, sœur Albertine médite sur cette génération qui, contre toute attente, se tourne vers le Christ.

Sœur Albertine, en 2022 à Lyon. Richard Mouillaud / Le Progrès/MaxPPP

La mort de Dieu était une certitude, l’étiolement de la foi une évidence. Dans une société individualiste, superficielle et trop occupée à se contempler, comment imaginer de la place pour l’Autre ? Les prédictions annonçaient donc un monde sans Dieu, libéré du religieux, vidé de tout mystère, incapable de profondeur. Et pourtant…

Il se passe quelque chose. Une soif grandit, un désir remonte à la surface. Il ne s’agit pas seulement des catéchumènes qui frappent à la porte de l’Église – même s’ils sont de plus en plus nombreux. Il y a quelque chose de plus large, de plus diffus, presque souterrain, mais bien réel : des jeunes qui s’interrogent, qui cherchent, qui posent des questions vraies. Qui parlent de Dieu entre eux de manière facile et décomplexée. Qui vont jusqu’à se confier dans l’espace discret de la messagerie Instagram. Une génération qui, contre toute attente – et peut-être même les nôtres –, se tourne vers le Christ.

Les réseaux sociaux se révèlent être l’un des outils suscitant cela. Après les avoir longtemps regardés avec méfiance, comme des lieux trop volatils pour accueillir une vraie quête spirituelle, nous constatons que la réalité nous dépasse et commençons à les apprivoiser comme une terre de mission. Aujourd’hui, 78 % des catéchumènes affirment que les réseaux sociaux ont joué un rôle dans leur chemin vers le baptême.

Une brèche qui surprend

Ce que l’on estimait naguère comme une surface trop bruyante pour parler de Dieu devient une zone de contact. Une brèche qui surprend. C’est souvent là, derrière un écran, qu’un cœur s’ouvre, qu’une question surgit, qu’un mot résonne. Non pas parce qu’il serait parfait, mais parce qu’il est entendu dans un langage accessible et arrive au bon moment.

Les réseaux sont, pour beaucoup, ce marchepied inattendu qui permet d’aller plus loin. Ils suscitent un premier « oui », fragile peut-être, mais réel. Et ce premier « oui » peut tout changer. Mais surtout, il ne reste pas isolé. Car ce qui entraîne, ce sont les jeunes eux-mêmes qui deviennent témoins pour d’autres. Ils se parlent entre eux, s’invitent, se passent le mot. L’Évangile circule de cœur en cœur, par des chemins que nous n’organisons pas.

Puis il y a eu comme un choc : cette affluence à la messe du mercredi des Cendres, où tant de jeunes, parfois éloignés de tout, ont franchi le seuil d’une église. On ne les attendait pas. Et ils sont venus. Non pas pour une expérience spirituelle à la mode, mais avec une vraie question sur Dieu. Ce n’est pas le goût du bien-être qui les anime, ni une nostalgie quelconque, mais une quête de sens qui va plus loin. Ils ne veulent pas seulement se sentir mieux. Ils veulent apprendre à prier. À rencontrer Quelqu’un.

Cela me frappe chaque jour : la manière dont Dieu surgit là où on ne l’attendait pas. Il y a presque de l’humour dans sa façon d’entrer dans le cœur de cette génération. Comme au matin de Pâques, quand Jésus se manifeste à ses disciples – et que personne ne le reconnaît tout de suite. Il est là, présent, vivant, mais sous un visage neuf. C’est ce que nous vivons aujourd’hui. De nouveaux visages apparaissent dans nos églises, des visages que nous ne reconnaissions pas comme « cathos » a priori. Et pourtant, c’est bien Lui qui passe. C’est sa manière de faire : imprévisible.

La foi n’est pas une habitude mais une aventure

Nous le savons, Pâques est un passage, mais nous l’imaginons parfois sans transformation. Si les disciples n’ont pas reconnu Jésus au matin de la Résurrection, c’est parce qu’Il n’était plus tout à fait le même. Le Ressuscité n’est pas un revenant. Il est le Vivant, transfiguré. Et c’est à cette même transformation que nous sommes tous appelés : laisser mourir certaines manières de faire, de penser, de croire, pour accueillir un visage neuf de Dieu, et peut-être aussi un visage renouvelé de nous-mêmes.

C’est une Pâques que vit l’Église. Ce qui se passe n’est pas un « retour du religieux » au sens nostalgique du terme. Ce n’est pas un temps de reconquête. Il ne s’agit pas de revenir à ce qui fut, mais d’entrer dans un avenir que Dieu, Lui, est déjà en train d’ouvrir. Gardons-nous de tout triomphalisme. Il serait tentant de brandir les conversions de jeunes adultes comme un étendard, mais la résurrection du Christ n’est pas un drapeau à agiter : elle est un feu discret, un souffle qui réchauffe, une lumière qui appelle. Et elle engage.

Alors comment accueillons-nous ces signes ? Sommes-nous prêts à adapter nos manières de faire, à nous laisser, nous aussi, convertir ? Ce que Dieu est en train de faire s’adresse à chacun. Il nous demande : veux-tu, toi aussi, renaître ? Car ces jeunes ne sont pas seulement en chemin vers Dieu. Ils sont, déjà, des témoins. Ils nous rappellent ce que nous avons peut-être oublié : que la foi n’est pas une habitude, mais une aventure. Qu’elle n’est pas la répétition du connu, mais la naissance de l’inattendu. Et qu’au cœur de cette aventure, brûle un désir immense de fraternité. Une fraternité réelle, pas décorative. Une Église incarnée, pas idéalisée. C’est là qu’ils nous attendent. C’est là que Dieu nous attend.

Repères : La religieuse aux centaines de milliers d’abonnés sur les réseaux sociaux

En seulement trois ans, sœur Albertine compte 161 000 abonnés sur TikTok et 285 000 sur Instagram. À 29 ans, cette influenceuse au sourire franc se décrit sur son profil YouTube comme « passionnée par l’évangélisation et missionnaire auprès des jeunes et sur les réseaux ».

Élevée dans une famille catholique à Lille, elle étudie la finance à Paris, et travaille dans un cabinet de conseil. À 24 ans, elle devient consacrée dans la communauté du Chemin-Neuf à Lyon.

Elle cherche à transmettre la Bonne Nouvelle, tout en rendant le message accessible. « Les réseaux sociaux sont une terre de mission », confie-t-elle. Elle aborde tous les sujets, y compris les plus sensibles, et déconstruit les clichés sur la vie d’une religieuse, avec un ton moderne et décomplexé.

« Parfois, on me demande si je ne m’ennuie pas comme religieuse, raconte-t-elle. Je ne comprends pas cette question même si je comprends qu’on puisse se la poser, car pour moi le christianisme n’a rien d’ennuyeux : Dieu est vivant et il nous appelle à une transformation constante. »

Source : La Croix

Publié dans Religion

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