Appel aux catholiques de France et à nos concitoyens
NOUS SOMMES TOUS RESPONSABLES DU DIALOGUE
Notre pays est secoué depuis plusieurs semaines par des manifestations importantes de personnes exprimant leur souffrance et leurs peurs. Des changements profonds qui marquent notre société, des choix politiques mal compris accentuent le sentiment d’exclusion. Cette crise montre à l’évidence un déficit d’écoute et de dialogue dans notre pays, des ruptures et des incompréhensions que vivent beaucoup de nos concitoyens, une méfiance croissante dans toute institution et la perte de confiance dans les corps intermédiaires.
Nous sommes témoins des violences qui ont émaillé les manifestations de ces dernières semaines. Elles ne mènent à rien et ne peuvent être en aucun cas un mode d’expression du malaise ressenti. Nous les condamnons sans réserve. Aujourd’hui, nous appelons chacun à assumer ses responsabilités et à accepter les voies de dialogue qui sont possibles pour que les choix nécessaires puissent être assumés dans le respect de chacun. Nous redisons que la solidarité doit être au coeur des relations humaines, tout spécialement vis-à-vis des plus fragiles. Seul, un dialogue courageux et constructif pourra contribuer à la recherche du bien commun.
J’appelle les catholiques à porter notre pays dans la prière en ce temps où nous attendons la venue du Prince de la Paix et à être chacun, là où il est, artisan de ce dialogue respectueux de l’autre.
+ Georges Pontier
Archevêque de Marseille
Président de la Conférence des évêques de France
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Appel aux catholiques de France et à nos concitoyens
À l’heure où nous écrivons, notre pays n’est pas encore sorti de la crise dite « des gilets jaunes » : crise révélatrice d’un malaise très profond et très ancien, qui engendre une grave défiance envers les responsables politiques.
Il serait à coup sûr très dommageable que cette situation délétère se prolonge. Mais chacun sent, plus ou moins confusément, que la sortie de crise sera difficile car les enjeux sont tout autres que conjoncturels : il en va de notre capacité collective d’espérer et de bâtir l’avenir. Comme nous l’écrivions il y a deux ans, « il faudrait être sourds ou aveugles pour ne pas nous rendre compte de la lassitude, des frustrations, parfois des peurs et même de la colère, intensifiées par les attentats et les agressions, qui habitent une part importante des habitants de notre pays, et qui expriment ainsi des attentes et de profonds désirs de changements. Il faudrait être indifférents et insensibles pour ne pas être touchés par les situations de précarité et d’exclusion que vivent beaucoup sur le territoire national »[1].
Nous constatons que notre démocratie manque de lieux d’échange et de réflexion qui pourraient permettre l’émergence à une large échelle de suggestions positives élaborées ensemble. L’affaiblissement de nombreux partis politiques et un recul significatif de l’engagement syndical contribuent à ce déficit. Où nos concitoyens trouveront-ils des lieux appropriés pour ce travail si urgent ?
L’Église catholique dispose d’un maillage de milliers de paroisses, réparties sur l’ensemble de notre territoire et riches de la présence de multiples mouvements, aumôneries et associations de fidèles. Lieu de prière, en particulier liturgique, la paroisse est aussi par nature et par vocation la « maison de famille fraternelle et accueillante » [2] pour tous et la « famille de Dieu, fraternité qui n’a qu’une âme » [3]. À ce moment de notre histoire, nous pouvons le montrer et apporter notre contribution pour aider notre société tout entière à surmonter la crise qu’elle traverse. Sans se substituer aux politiques, l’Église offre un espace pour faire grandir la fraternité.
Notre proposition
Nous sommes à quelques jours de Noël, mais dès maintenant il est possible d’entreprendre une réflexion qui pourra se poursuivre tout le temps nécessaire, en lien avec tout ce qui se déroulera sur le territoire. C’est maintenant que nos concitoyens ont besoin de débattre entre eux et de disposer de lieux pour le faire.
C’est pourquoi nous vous proposons, dans les semaines à venir, de susciter partout où ce sera possible des groupes d’échanges et de propositions en invitant très largement d’autres personnes, partageant ou non notre foi, qui peuvent être intéressées d’y participer et d’y apporter leurs idées.
Pour ce travail, à titre de pistes de réflexion, nous vous suggérons les cinq questions suivantes :
1/ Quelles sont selon vous, en essayant de les hiérarchiser, les causes principales du malaise actuel et des formes violentes qu’il a prises ?
2/ Qu’est-ce qui pourrait permettre aux citoyens dans notre démocratie de se sentir davantage partie prenante des décisions politiques ?
3/ Quels sont les lieux ou les corps intermédiaires qui favoriseraient cette participation ?
4/ Quel « bien commun » recherché ensemble pourrait fédérer nos concitoyens et les tourner vers l’avenir ?
5/ Quelles raisons d’espérer souhaitez-vous transmettre à vos enfants et petits-enfants ?
Nous vous suggérons de transmettre vos réponses à vos élus. Votre évêque lui aussi sera heureux d’en être informé.
Le 11 décembre 2018,
Le Conseil permanent de la Conférence des évêques de France
Mgr Georges PONTIER, Archevêque de Marseille, président de la CEF
Mgr Pierre-Marie CARRÉ, Archevêque de Montpellier, vice-président de la CEF
Mgr Pascal DELANNOY, Évêque de Saint-Denis, vice-président de la CEF
Mgr Michel AUPETIT, Archevêque de Paris
Mgr Jean-Pierre BATUT, Évêque de Blois
Mgr François FONLUPT, Évêque de Rodez
Mgr Stanislas LALANNE, Évêque de Pontoise
Mgr Philippe MOUSSET, Évêque de Périgueux
Mgr Benoît RIVIÈRE, Évêque d’Autun
Mgr Pascal WINTZER, Archevêque de Poitiers
[1] Conseil permanent de la Conférence des évêques de France, Dans un monde qui change retrouver
le sens du politique, coédition Bayard-Cerf-Mame 2016, p. 12.
[2] S. Jean-Paul II, Exhortation apostolique Christifideles laici, 1988, n° 26.
[3] Vatican II, Constitution dogmatique sur l’Église Lumen Gentium, n° 28.
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